2030 Revisité

by Father John McCloskey

A l'occasion du grand Jubilée de l'an 2000, j'ai publié un grand article dans le Catholic World Report, intitulé "2030 : regard en arrière". C'est une fiction dans laquelle un prêtre catholique (mon alter ego) réfléchit sur l'histoire de l'Église (tout particulièrement l'histoire récente), en mettant l'accent sur les États-Unis.

J'ai reçu - ou ma thèse a reçu - une bonne dose de critiques au vitriol de la part de l'élite des principaux media, et même pour finir de Tim Russert à Meet the Press. Un bon nombre d'écrivains profondément catholiques l'ont également trouvé sombre et inquiétant, quoique j'ai cherché à être positif et optimiste. Jetez un œil ici et voyez ce que vous en pensez.

En 2030, mon alter ego prêtre se penche sur l'histoire récente : le destin des catholiques américains devenus confesseurs et martyrs de la foi suite à la persécution engagée par un gouvernement fédéral imprégné de "la culture de mort". En raison d'une faiblesse prophétique de ma part, le Père Charles, mon double, ne relate pas l'arrivée des personnages Felsenburghiens [NDT : allusion à un personnage de "Lord of the World" de Mgr Robert Hugh Benson] .

Il y a beaucoup plus dans la rétrospective "2030", le Père Charles se remémorant la sécession, au sein des États Unis d'Amérique, des États prônant la "Culture de Vie", prélude à une courte et sanglante guerre civile débouchant sur la création des États Régionaux d'Amérique. Quant à l'Église, "2030" la trouve plus réduite mais rayonnante de Foi, riche en vocations chez les laïcs et sans dissension aucune. Quand j'ai écrit ce texte, le bienheureux Jean-Paul venait d'ouvrir l'année jubilaire, le communisme était quasi détruit, les États-Unis restaient la seule grande puissance au monde et le choc du 11 septembre n'avait pas encore eu lieu.

Cependant, le pape Jean-Paul n'était en aucune manière un optimiste béat. Il avait vécu l'occupation nazie et l'occupation communiste de la Pologne et au moment où j'écrivais, sa patrie n'avait que récemment recouvré sa souveraineté et une vie démocratique. A ce moment, il prévoyait une Nouvelle Évangélisation qui inaugurerait une civilisation d'amour et de vérité pour les siècles à venir. Et sa vision peut encore se réaliser, mais probablement pas avant que tous ceux qui lisent ces lignes ne soient entrés dans la vie éternelle.

Son successeur plus qu'inattendu, le pape Benoït XVI, a longtemps eu une vision plus sombre, en phase avec mon épistolier imaginaire :

L'Église s'amenuisera et devra reprendre plus ou moins comme au commencement. Elle ne sera plus capable d'habiter les édifices construits du temps de sa prospérité. La diminution de ses effectifs ira de pair avec la perte de nombre de ses privilèges sociaux. Comme toute petite communauté, elle (l'Église) exigera beaucoup de ses membres.

Bien sûr, notre pape actuel évoque l'Occident (Europe et Amérique du Nord) plutôt que l'Afrique, l'Asie et l'Amérique du Sud. Il poursuit :

Ce sera dur pour l'Église, car le processus de cristallisation et de clarification lui coûtera beaucoup d'énergie. Cela la rendra pauvre et la fera devenir l'Église de l'humilité... Le processus sera long et épuisant, comme le chemin depuis le faux progressisme à l'aube de la Révolution française... Mais quand l'épreuve de ce passage au crible sera passée, l'Église, spiritualisée et simplifiée, rayonnera avec puissance. Dans un monde totalement planifié, les hommes souffriront d'une solitude inexprimable. S'ils ont complètement perdu Dieu de vue, ils ressentiront l'horreur de leur pauvreté. Alors ils découvriront le petit troupeau des croyants comme quelque chose d'entièrement nouveau, une espérance qui a du sens pour eux, une réponse qu'ils ont toujours secrètement cherchée.
Ainsi, il me semble certain que l'Église aborde des temps très difficiles. La vraie crise a à peine commencé. Nous devons nous attendre à de terribles bouleversements. Mais je suis tout aussi certain de ce qui restera à la fin : non pas l'Église du culte politique, morte avec la Mondialisation, mais l'Église de la Foi. Elle ne sera plus le pouvoir social dominant qu'elle était jusque tout récemment, mais vivra un renouveau et sera perçue comme le foyer de l'homme, le lieu où il trouve la vie et l'espoir au delà de la mort.

La décadence morale dans les domaines cruciaux de la famille et des institutions sociales ainsi que l'attaque actuelle contre les institutions catholiques, au sein d' États-Unis qui cessent d'être exceptionnels, ne sont guère surprenantes, étant donné le déclin du moralisme protestant et l'impact dévastateur causé par la confusion lors de la mise en application des enseignements du concile Vatican II.

Le temps n'est pas à l'optimisme ou au pessimisme, mais bien plutôt à un réalisme augustinien, nourri de Foi, d'Espérance, de Charité et de fidélité au Christ et à son Église. Prenons les premiers chrétiens comme modèles, ils nous enseignent entre autres choses que pour de véritables chrétiens, la récompense finale ne se trouve pas en cette vie mais dans l'autre.

First appeared in The Catholic Thing, March 15, 2012.